La Chine face à la crise immobilière : l’effondrement d’Evergrande fragilise Pékin

La Chine est confrontée à une crise immobilière

La Chine est confrontée à une crise immobilière sans précédent, révélant les fragilités de son modèle économique centré sur l’investissement massif et l’exportation. L’effondrement du géant de l’immobilier Evergrande a intensifié les défis auxquels le pays fait face. Malgré les tentatives du gouvernement pour stabiliser le marché, les signes de reprise se font attendre.

Points clés à retenir :

  • L’effondrement d’Evergrande : La liquidation judiciaire du géant immobilier Evergrande à Hong Kong souligne la gravité de la crise immobilière en Chine.
  • Endettement massif des promoteurs : Des entreprises comme Evergrande et Country Garden sont accablées par des dettes colossales en raison de pratiques d’endettement excessives.
  • Secteur immobilier en déclin : Les indicateurs clés du secteur sont en baisse constante depuis 2022, avec des prix de l’immobilier en chute libre.
  • Absence de plan de relance massif : Les autorités chinoises privilégient la stabilité monétaire et une approche conservatrice, refusant de mettre en place un plan de relance significatif.
  • Consommation intérieure faible : L’économie chinoise reste orientée vers l’offre, avec une épargne élevée des ménages au détriment de la consommation.
  • Tensions commerciales internationales : Les relations tendues avec l’Union européenne et les États-Unis ajoutent une pression supplémentaire sur l’économie chinoise.
  • Dépendance à l’exportation : Sans demande intérieure robuste, la Chine compte toujours sur ses exportations pour soutenir sa croissance.

Un secteur immobilier en difficulté

L’accumulation de dettes par les promoteurs immobiliers

Pourquoi ces promoteurs ont-ils accumulé autant de dettes ?

  1. Modèle de financement risqué : Les promoteurs immobiliers chinois, tels qu‘Evergrande et Country Garden, ont longtemps utilisé un modèle de financement basé sur l’endettement massif pour financer leur expansion rapide. Ils ont emprunté d’énormes sommes d’argent pour acheter des terrains et lancer de nouveaux projets, comptant sur la vente anticipée des biens pour rembourser leurs dettes.
  2. Dépendance aux préventes : Ces entreprises ont souvent vendu des appartements sur plan, utilisant les fonds des acheteurs pour financer la construction. Ce modèle a fonctionné tant que les ventes étaient élevées, mais il s’est effondré lorsque la demande a diminué.
  3. Surconstruction et offre excédentaire : L’expansion rapide a conduit à une surabondance de logements, en particulier dans les villes de deuxième et troisième rangs, où la demande est insuffisante. Cela a entraîné une baisse des prix de l’immobilier et une diminution des ventes.
  4. Répression réglementaire : En 2020, le gouvernement chinois a introduit les « trois lignes rouges », des mesures visant à limiter l’endettement excessif des promoteurs immobiliers. Ces restrictions ont réduit l’accès au financement, exacerbant les problèmes de liquidités des entreprises déjà lourdement endettées.
  5. Ralentissement économique et pandémie : La pandémie de COVID-19 a ralenti l’économie chinoise, réduisant la demande immobilière. Les mesures strictes de confinement ont également perturbé les activités de construction et de vente.
  6. Manque de diversification : Beaucoup de promoteurs se sont concentrés presque exclusivement sur l’immobilier résidentiel, sans diversifier leurs activités. Cela les a rendus vulnérables aux fluctuations du marché immobilier.

Cas spécifiques :

  • Evergrande : Avec une dette estimée à plus de 300 milliards de dollars, Evergrande est le symbole de la crise. Son modèle de croissance rapide basé sur l’endettement l’a rendu insoutenable face aux nouvelles régulations et à la baisse de la demande.
  • Country Garden : Autre géant du secteur, il a annoncé des pertes pouvant atteindre 7,6 milliards de dollars pour les six premiers mois de l’année. Les investisseurs craignent son incapacité à rembourser ses dettes, ce qui a fait chuter le cours de son action.
  • Zhongrong International Trust : Cette société de fiducie financière, gérant environ 85 milliards de dollars d’actifs, a récemment manqué à ses obligations envers les investisseurs. Spécialisée dans des investissements à haut rendement souvent liés à l’immobilier, elle illustre l’extension de la crise au secteur financier.

Une approche gouvernementale conservatrice

Absence de plan de relance massif

Malgré la gravité de la situation, le gouvernement chinois a choisi de ne pas lancer de plan de relance massif, contrairement à ce qu’il avait fait lors de crises économiques précédentes.

  • Stabilité monétaire privilégiée : La Banque populaire de Chine maintient une politique monétaire prudente, craignant que des mesures de relance agressives n’entraînent une inflation ou une bulle financière.
  • Réorientation économique : Les autorités cherchent à réduire la dépendance de l’économie à l’égard de l’immobilier et à promouvoir des secteurs comme la technologie et la consommation intérieure.
  • Méfiance envers les politiques keynésiennes : Le président Xi Jinping a exprimé sa réticence envers les politiques de relance de la demande, préférant des solutions à long terme axées sur la production et l’innovation.

Conséquences de cette approche

  • Confiance des investisseurs ébranlée : L’absence de soutien massif au secteur immobilier a accru les inquiétudes des investisseurs, tant nationaux qu’étrangers.
  • Maintien de l’épargne élevée : Les ménages continuent de privilégier l’épargne en raison de l’incertitude économique, ce qui freine la consommation.

Tensions commerciales et impact mondial

Relations tendues avec l’Union européenne

  • Mesures de rétorsion : En réponse aux droits de douane européens sur certains produits chinois, Pékin a annoncé des enquêtes antidumping sur des produits européens, augmentant les tensions commerciales.

Ralentissement de la croissance mondiale

  • Prévisions économiques en baisse : Les institutions financières internationales ont revu à la baisse les prévisions de croissance de la Chine, ce qui pourrait affecter l’économie mondiale étant donné le poids du pays dans le commerce international.
  • Perte de confiance globale : La crise immobilière chinoise suscite des inquiétudes quant à une possible contagion financière, même si le risque systémique reste limité pour le moment.

Dépendance à l’exportation et manque de demande intérieure

En l’absence d’une consommation intérieure robuste, la Chine continue de dépendre de ses exportations pour soutenir sa croissance. Les tensions commerciales actuelles menacent ce modèle économique, mettant en évidence la nécessité pour le pays de rééquilibrer son économie.


Conclusion

La crise immobilière en Chine, symbolisée par l’effondrement d’Evergrande et les difficultés de Country Garden et d’autres acteurs majeurs, révèle les limites du modèle économique actuel du pays. L’endettement excessif des promoteurs, combiné à une régulation plus stricte et à une demande en baisse, a créé une tempête parfaite pour le secteur.

Sans une demande intérieure solide et face à des tensions commerciales croissantes, la Chine est confrontée à des défis majeurs pour maintenir sa croissance. Les mesures actuelles semblent insuffisantes pour inverser la tendance, laissant planer des incertitudes sur l’avenir du marché immobilier et de l’économie chinoise en général.


Perspectives

  • Réformes structurelles nécessaires : Pour éviter une détérioration supplémentaire, la Chine devra peut-être adopter des réformes visant à stimuler la consommation intérieure, diversifier son économie et gérer de manière plus durable le secteur immobilier.
  • Surveillance internationale accrue : Les acteurs mondiaux surveillent de près la situation, conscients que la santé économique de la Chine a des répercussions significatives sur l’économie mondiale.
  • Possibilité de contagion limitée mais réelle : Bien que le système financier chinois soit relativement fermé, une détérioration continue pourrait affecter les marchés financiers internationaux, notamment par le biais de la confiance des investisseurs.

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