VINISUD Asia : les vins de la Méditerranée à la conquête de la Chine
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La première édition de VINISUD Asia, salon professionnel international des vins et spiritueux méditerranéens, s’est tenue à Shanghai du 26 au 28 février 2013.
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Depuis sa création en 1994, le salon Vinisud avait lieu tous les deux ans dans le Sud de la France à Montpellier et avec succès puisqu’il figure dans le « Top 4 » des salons viticoles mondiaux, souligne son président Fabrice Rieu. Pour ce dernier,
« créer un Vinisud en Chine continentale à Shanghai en alternance avec l’édition française de Montpellier (24-26 février 2014), à l’instar de ce qui se pratique dans le cadre de Vinexpo entre Bordeaux et Hong Kong » a pour objectif de « recruter de nouveaux acheteurs et de s’ouvrir à de nouveaux marchés » (source : Vinisud, 2012). Pour les vins méditerranéens, « premier vignoble dans le monde avec plus de 50% de la production mondiale »
(source : Vinisud Asia, 2013)
La Chine est en effet devenue un marché cible, sachant qu’elle est déjà le premier client (en valeur et 3ème en volume) en vins du Languedoc-Roussillon sous appellation d’origine protégée (AOP) (source : Douanes françaises, 2012).
Cette première édition dans le Hall N5 du Shanghai New International Expo Centre (SNIEC, quartier de Pudong) a été organisée par Adhesion Asia Ltd (Euromoney Institutional Investor PLC Media group), en collaboration avec Huamao International Exhibition (Shanghai) Co. Ltd. (CCPIT Shanghai) et avec le soutien de nombreux partenaires institutionnels et médias. Quel bilan peut-on en tirer ?
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Un objectif de fréquentation largement dépassé
En termes de fréquentation, l’objectif fixé par Adhesion Asia à 4000 visiteurs au total pour les 3 jours du salon a été largement dépassé : avant l’ouverture, on comptait déjà 3000 professionnels pré-enregistrés ; 1567 visiteurs dès le premier jour du salon, 2285 le deuxième jour et 1334 le troisième jour, soit un total de 5186 visiteurs selon Olivier Darras, directeur général d’Adhesion Asia. Il rappelle que l’objectif de ce salon n’était « pas quantitatif », mais visait à être « sélectif pour n’avoir que des professionnels » du vin (source : Vinisud Asia, 2013).
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Des exposants dans l’ensemble satisfaits, mais affaire(s) à suivre…
S’agissant de la fréquentation des visiteurs sur les stands, soit 320 exposants représentant les vignobles du Sud de la France (Languedoc, Roussillon, Provence, Rhône, Corse) et du bassin méditerranéen (Espagne – Rioja, Portugal, Sicile, Grèce, Moldavie, Liban, Maroc, Algérie, Tunisie), il s’avère difficile d’en évaluer l’impact commercial à court terme : dans l’ensemble, les exposants sont satisfaits d’avoir noué des contacts avec des professionnels chinois et ce, jusqu’à la fermeture du salon pour beaucoup d’entre eux. Comme pour chaque salon professionnel du vin, un travail de suivi est nécessaire afin d’espérer transformer les contacts en clients. Affaire(s) à suivre…
Un bémol néanmoins : le non-accès au wifi alors que de nombreux exposants avaient notamment prévu des QR Codes, permettant d’accéder aux fiches techniques des vins, afin de s’adapter aux usages du téléphone mobile par les chinois.
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Des visiteurs présents aux animations, mais des Master Class à optimiser
Parmi les animations proposées au salon, 12 Master Class étaient organisées (pour la plupart en sessions parallèles) sur des thématiques liées aux vins rouges, blancs, rosés du Sud de la France (Languedoc, Roussillon, Provence, Rhône, Corse) et du bassin méditerranéen (vins crétois, siciliens).
Ma participation à 8 Master Class, ainsi que mes échanges avec des professionnels du vin français et chinois m’ont permis d’identifier les principaux facteurs-clés de succès pour améliorer la transmission des connaissances auprès des professionnels chinois.
Choix de l’intervenant : privilégier les œnologues ou sommeliers car la fréquentation a été souvent plus massive aux Master Class animées par ces intervenants comme Olivier Poussier (meilleur sommelier du monde 2000) en raison d’une recherche d’expertise « labellisée » (par un diplôme, une récompense…). Pour les interventions effectuées par des représentants d’interprofessions, il s’avère important d’expliquer le rôle de cet organisme, la fonction exercée et, idéalement, d’être accompagné par au moins un producteur de renom de la région viticole car les chinois se montrent très attachés à l’histoire familiale, donc préfèrent être en contact direct avec le vigneron (versus un responsable commercial, par exemple). Cela vaut également pour le choix des équipes sur les stands.
Langue parlée : éviter les Master Class en français, même avec une traduction en mandarin, car cela a donné lieu à des incompréhensions (questions du type « What does domaine mean? », « What does vignoble mean? »). Privilégier l’anglais et la traduction en mandarin sachant que le vocabulaire anglais lié au vin n’est pas toujours maîtrisé (question « What does vineyard mean? »). Par conséquent, un glossaire bilingue anglais / chinois contribuerait à améliorer la connaissance des chinois non seulement sur les fondamentaux de la vigne et de la dégustation de vin, mais aussi sur les appellations et les principales institutions viticoles françaises (comme l’INAO, cité à plusieurs reprises). En particulier, cela leur permettrait de mieux saisir les spécificités du marché du vin en France d’autant que le cœur de cible des participants à ces Master Class était relativement jeune (25-35 ans).
Support de présentation : pour les mêmes raisons que celles indiquées précédemment, opter pour un support bilingue anglais / mandarin de façon à faciliter la compréhension des professionnels non francophones et des professionnels chinois puisqu’il s’agit d’un salon international.
Contenu de la présentation :
– Contexte historique : expliciter les références historiques (à la région viticole, au vignoble, etc.) en faisant, dans la mesure du possible, le parallèle avec l’Histoire de la Chine pour que le discours soit plus parlant ;
– Géographie : illustrer systématiquement les propos liés à la situation géographique des terroirs, cépages et vins dégustés par une carte afin de faciliter le repérage et, par voie de conséquence, la mémorisation des vins français (question « Where is Béziers in Languedoc? ») ;
– Dégustation : décrire les différentes associations du vin (fleurs, fruits, épices, arômes…) en montrant des visuels, voire les produits concernés afin que l’analyse de la dégustation soit basée sur des éléments tangibles, et donc plus évocatrice pour les participants (question : « What is cinnamon ? »). Au niveau des accords mets et vins, faire référence à la cuisine chinoise en donnant des exemples de plats plus précis que « cuisine épicée », « sucrée » ou « dim sum » et montrer les photos des plats cités afin que les chinois puissent se projeter dans une situation de consommation (question « Which wine with a Chinese fondue? »).
Clôture de la Master Class : au vu des nombreuses demandes à l’issue des Master Class, systématiser la distribution de la présentation sur clé USB et planifier une séance photos avec les participants.
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En résumé, il s’avère primordial d’intégrer plus largement la dimension visuelle dans les Master Class et de permettre l’utilisation des QR Codes car cela favorise en général une plus forte implication des participants via une démarche expérientielle. Pour mieux se familiariser avec les vins de la Méditerranée, cette démarche pourrait également intégrer le marketing sensoriel : une photo de champ de lavandes avec l’odeur de lavandes aurait plus d’impact. Bilan de cette première édition du salon VINISUD Asia à Shanghai : on dirait presque le Sud !
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Sandra Painbéni
Enseignant-chercheur en Marketing – European Business School Paris
Fondatrice-dirigeante de Be Creative Zen – Formation & Conseil en Marketing de la Culture
Twitter @BeCreativeZen